La blogueuse Aifelle s'exclamait
récemment à propos du prix Goncourt: ce serait bien que ces messieurs pensent enfin à une femme
! L'idée m'est venue de faire, à ce sujet, un bref état des lieux sur les prochains prix littéraires
majeurs.
Les prix français les plus connus viennent au devant de l'actualité: le 30 octobre sera l'heure du Grand Prix de L'Académie
Française, le 3 novembre viendront le Femina et le Médicis, pour culminer le 10 novembre avec le jalousé Goncourt et son cousin le Renaudot. Depuis que
les Georges Sand, Virginia Woolf et consœurs ont secoué le monde de l'écriture en affirmant les plumes féminines, qu'en est-il de la reconnaissance officielle des femmes dans les lettres ? Les
talents ne sont pas mis en doute, mais on constate qu'elles obtiennent les faveurs des grandes récompenses bien moins fréquemment que les écrivains masculins, alors que le lectorat devient de
plus en plus féminin.
Depuis le premier chèque (réévalué à 10 € aujourd'hui, à
encadrer) en 1903, sept femmes ont obtenu le Goncourt : Elsa Triolet, Simone De Beauvoir, Anne Langfus, Edmonde Charles-Roux, Marguerite Duras, Paule
Constant, Marie Ndiaye. C'est très peu si on sait que ce
prix a été décerné tous les ans sans exception. Deux d'entre elles font partie du jury actuel, Paule Constant et Edmonde Charles-Roux, cette dernière voisine de couvert (et de rayons de bibliothèque) de Françoise Chandernagor. Et on a fait le tour des dames jurés, 3 sur 10
membres au total.
Peut-on espérer une lauréate du Goncourt cette année ? La répartition des sélections est inégale même si la part est
significative, 4 auteures pour 15 titres:
Marie Darrieussecq
Sylvie Germain
Chantal Thomas
Karine Tuil
La présence féminine pour le Renaudot
est moins réjouissante : seules Cloé Korman et Patricia Reznikov sont reprises, soit 2/12. Et l'académicienne Dominique
Bona paraît bien isolée dans le jury.
© Céline Jalabert -
Inspiration secrète
Les douze dames du jury Femina auront le choix parmi une sélection qui atteint presque la parité (7/15)
avec :
Laura Alcoba
Brigitte Giraud
Léonora Miano
Céline Minard
Véronique Ovaldé
Patricia Reznikov
Karine Tuil
Il semble que les femmes de lettres du Femina ne sont aucunement partisane, au plan du genre tout au moins,
puisque les seules Gwenaëlle Aubry et Nancy Huston ont obtenu le prix dans les dix dernières années.
Le prix Médicis du roman français voit trois femmes, sur 8 titres, franchir la deuxième sélection, déjà citées
précédemment, à l'exception de la réalisatrice Delphine Coulin. Pour ce que je sais du jury Médicis, il n'atteint pas encore la parité. Quant aux sélections pour le
roman étranger et les essais, la proportion de noms féminins confirment ces chiffres. Les trois sélectionnées :
Delphine Coulin
Marie Darrieussecq
Céline Minard
Enfin, les prix de L'Académie Française, Interallié et Décembre proposent respectivement 3 (sur 9), 5 (sur 12) et 2 (sur 15) candidates avec les noms
suivants: Nelly Alard, Sylvie Germain, Capucine
Motte, Nelly Alard, Judith Perrignon, Monica
Sabolo, Karine Tuil, Flore Vasseur, Brigitte Giraud,
la première étant reprise dans les trois concours. Ici encore, la proportion de femmes est inférieure ou très inférieure à
celles des auteurs masculins.
Faites vos jeux ! L'année passée, seule Emmanuelle Pireyre avait obtenu une palme, avec une féerie que personnellement je n'ai pas
trouvée digne d'un grand prix littéraire. Il est simplificateur et insignifiant – mais amusant – de considérer tout cela comme une compétition hommes/femmes, même si les jurés
ne prennent sans doute nullement en compte le genre des auteurs pour choisir le livre lauréat. Mais les chiffres révèlent une disproportion marquante qui suscitent des questions auxquelles je me
garderai de répondre, en l'absence d'hypothèse suffisamment fondée. Je note cependant que si nous ne lisions que des prix littéraires, nous passerions à côté de vrais bijoux, dûs indistinctement à des auteurs des deux genres – et souvent moins chers.
© Mix
& Remix
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